Sorti l'année passée aux Éditions Bruno Doucey, C'était pour du beurre resplendit d’abord sous ses couleurs citron. Orianne Papin y réexplore son enfance avec la même soif, le même désir et la fougue qu'on a à ses cinq ou huit ans, cette « peur de rien », les rêves en bandoulière, parce qu'« il fallait / coûte que coûte / savoir / si d'autres mondes », et parfois si un bouton d’or sous le menton était révélation.

L'enfance, ses joies de pas grand-chose, « gendarmes à deux têtes », définitions de soi, ses grandes et petites peurs : « les loups / les monstres et les sorcières » « et oser demander une baguette » à la boulangerie. Et puis ses grands courages, « tatouages Malabar », ses royaumes conquis et ses rébellions, parce qu’il faut mettre la table. Des expériences de vie à laisser perplexe le moindre recruteur, car nous étions alors moutons à cinq pattes.

Enfance, quand le jeu n'est pas jeu, que l'on « [joue] pour de vrai », quand on peut tout être, que tout paraît normal, surtout l'improbable parce que « pour [nous] / [les parents ont] tout inventé » et que « pour [eux] / [nous avons] tout cru ». La fiction comme « accord tacite d’amour ». Car de l’amour, ici, il y en a plein.

Contrairement à son titre, C'était pour du beurre compte pour beaucoup. Sous couvert d’histoires et de ressentis personnels, il touche à l’humain, au sensible et à l’universel. Et alors que je termine cette chronique, sur le bord d’une plage, ma fille me demande si je veux une glace guimauve-chocolat, et me tend une boule de sable. Je feins alors de me régaler. Se rappeler aussi, que nous avons été.